Witold Oleszak & Roger Turner Fragments of Part Freeform
Association cd FFA651
Voici le deuxième acte
enregistré du tandem piano – percussion de Witold Oleszak et Roger Turner. Pas
moins de 16 morceaux dont neuf autour des deux minutes et quelques-uns de 4 ou
5 minutes. Echanges vifs, explorations du cadre, piano préparé, sens en éveil,
espaces ajourés, poésie du son, … Roger
Turner est sans doute un improvisateur relativement insituable qui peut se
révéler aussi intimiste et secret avec Phil Minton qu’explosif et
ultra-polyrythmique avec Hannes Bauer et Alan Silva… Avec le pianiste Witold Oleszak, il vise la pertinence
du propos soulignant ou commentant les digressions du clavier via les
mécanismes, le cadre et la résonance de la « caisse » ou en poursuivant
les vagues des doigtés. La musique est concise, sèche, et elle va droit au but,
cultivant l’essentiel d’une belle idée par morceau. C’est un beau témoignage
d’improvisations qui respirent et se meuvent dans l’évidence sans en faire trop.
Le piano imprime souvent les pulsations et le percussionniste a un malin
plaisir à les contourner avec légèreté et subtilité. L’attention est captée la
plupart du temps avec des arrêts sur image et une foultitude de détails qui
stimulent l’écoute. Alors que nombre de ses collègues essayent de se commettre
avec ceux qui comptent sur la scène (notoriété et visibilité), Roger Turner
montre encore une fois qu’il a plaisir à jouer avec des amis rencontrés sur la
route et qui comme lui ont la plus haute idée de la musique et de la scène
improvisée radicale : prendre un réel plaisir avec un excellent partenaire
avec qui la communication et l’échange est une manifestation de la vie et le
langage du cœur en ne souciant guère du reste. Un excellent enregistrement. On
doit aussi à ce label une somme fantastique du trio légendaire the Recedents
(Lol Coxhill Mike Cooper Roger Turner) en cinq cédés : Wish you were
here !!
Ceux qui avaient fait
confiance au choix du label Emanem de publier Gratuitous Abuse du trio Barrel seront récompensés. Ces trois
praticiens de la musique improvisée londonienne et piliers du London
Improvisers Orchestra en ont été tellement encouragés que leur concert de St Johann
In Tirol nous les révèle dans une forme et une inspiration encore supérieure à
leur premier opus. Il y a là une série de séquences, d’interactions, d’idées
développées ou seulement suggérées, d’élans ou de retenue dans plusieurs
dimensions qui sollicitent l’écoute attentive et ne laissent pas l’imagination
choir ne fut ce que cinq secondes. Johannes Rosenberg a souligné ô combien les
improvisateurs cordistes sont faits pour jouer ensemble corde à corde, archet
avec archet. C’est l’évidence-même. Voici des artistes qui ne sont peut être pas
aussi « impressionnants » que certains de leurs collègues (on pense
au violoncelliste Tristan Honsinger ou aux violonistes Carlos Zingaro et Jon
Rose) mais qui, une fois réunis, finissent par vous remuer, interpeller et
enthousiasmer tout autant. Leur trio est devenu bien plus que la somme du
talent de chacun d’eux. La synergie de
leurs qualités bonifient l’apport de chacun dans un tout fascinant.Vraiment
magnifique. Querelleur ou lyrique, micro tonal ou sonique, intimiste ou
énergétique. Contorsionné ou avec un supplément de nuances. Des pizz en
pagaille ou l’alto qui déraille avec un certain humour et puis tout se termine
avec un filet de son quasi vocalisé. On a droit à toute la gamme des sentiments
et des expressions. Unique dans le genre. Parcourez les magazines et les blogs,
les catalogues : il n’y en a que pour les saxophones, trompettes, piano ou
guitare ou le sempiternel axe souffleurs-avec (ou sans) piano, basse et
batterie. Sans parler des effets électroniques. Toujours la même quadrature du
cercle. Un duo ? Ce sera saxophone et percussion voire saxophone et
contrebasse ou le sempiternel trio piano-basse-batterie. On ajoute parfois un
trombone, un vibraphone ou un violoncelle. Au mieux, on enlève la batterie. Et
finalement le paysage de la (pseudo) avant-garde ou du free jazz « sans
composition » dit « libre » devient une lingua franca récurrente
avec le personnel qui tourne dans tous les festivals ou lieux en vue (parfois presque
pour des peanuts, je sais !) et qui se voient recyclés au fil des
parutions. Moi, en musique je déteste m’ennuyer et je suis sidéré qu’il n’y ait
pas plus de configurations instrumentales originales. Au moins ici avec Barrel,
Hannah Marshall (cello), Alison Blunt (violon) et Ivor Kallin (alto), vous avez
l’assurance que la musique sort des sentiers battus parce qu' un trio de cordes
en folie comme cela, vous n’êtes pas prêts d’en trouver un pareil dans les
vingt cinq piles de cédés labellisés « musique improvisée libre » où
on retrouve ces configurations instrumentales relativement formatées etc… sans
parler de l’invasion électroïde... Si ce n’est l’excellentissime Stellari Quartet de Phil Wachsmann,
Charlotte Hug, Marcio Mattos et John Edwards, lui aussi publié il y a quelques
années par Emanem. Il y a aussi chez Barrel un aspect joyeusement ludique
qui évite le côté souvent sérieux ou austère des quatuors à cordes
« contemporain». Bref le trio Barrel, c’est une cuvée unique
en son genre. Heureusement à St Johann in Tirol, un organisateur éclairé a
compris tout le parti qu’on pouvait tirer de trois cordistes aussi enjoués et
complices. Un vrai régal !
Inem gortn Riverloam
trio Mikolaj Trzaska Ollie Brice Mark Sanders FMR
La pochette de ce digipack
indique seulement riverloam trio et le titre
inem gortn. Au rythme soutenu des sorties du label FMR (et des
labels frères Clean Feed, No Business, NotTwo), cet album risquerait bien de
passer inaperçu. Au verso, on découvre les noms de Mikolaj Tzraska sax alto, clarinet et bass clarinet, Ollie Brice double bass et Mark Sanders percussion. Sanders est
connu comme un vieux sou aux côtés d’improvisateurs incontournables comme Evan
Parker, John Butcher, Veryan Weston, Trevor Watts, Elton Dean, Paul Dunmall,
John Edwards, Paul Rogers. Ollie Brice est devenu récemment un des contrebassistes
qui comptent en Grande Bretagne, rejoignant avec une remarquable spécificité la
confrérie britannique visible dans la
scène « free-music » : les Barry Guy, Paul Rogers, John Edwards,
Simon H Fell, John Edwards, Dom Lash et Guillaume Viltard. Un sérieux client
avec un son imposant, une puissance qui pousse et soulève qui évoque un Charlie
Haden. Quant à Mikolaj Trzaska, il
est un des principaux acteurs dans la scène polonaise du jazz libre. Son nom
apparaît dans une collaboration discographique avec Lester Bowie vers la fin
des années 80’s et plus récemment, dans une série d’enregistrements publiés par
le label polonais NotTwo. Entre
autres, il y joue avec Ken Vandermark, Peter Brötzmann et Joe McPhee. Ceux qui
sont accros à Brötzmann et il doit y en avoir pas mal, si on doit faire le
comptage de tous les albums qui paraissent sous son nom et qu’il devient de
plus en plus impossible de relever (de mon jeune temps, c’était facile :
on appuyait sur le bouton FMP et le
tour était joué), feraient bien de jeter un coup d’oreille. On va pas quand
même écouter toujours les mêmes. Puissance, rage, charge émotionnelle, mais
aussi sens des nuances, goût pour la mélodie. Avec un percussionniste
polyrithmicien aussi nuancé au niveau de la frappe et du métal et créateur
d’équilibres à la fois aérien et terrien comme Sanders, le son de contrebasse
aussi balancé dans le grave et l’émission du pizzicato énorme de Brice sans
parler de la largesse du frottement à l’archet, c’est un trio gagnant. Cela
dit, la qualité de la prise de son est un régal. Ce qui rend cette musique
agréable et sa puissance irrésistible se trouve dans la manière naturelle où et
comment l’énergie se libère sans que les protagonistes en rajoutent une couche.
Un bel équilibre qui rend opérants au mieux les différents paliers expressifs
du souffleur entre le cri expressionniste et la retenue pensive. La pince
puissante du contrebassiste emmène l’imagination dériver dans un autre univers,
élégiaque celui-là et le percussionniste trouve en permanence le ton juste et
la dynamique la plus appropriée. Dans plusieurs moments, on quitte le sentier
balisé du trio souffleur/basse/batterie pour un questionnement du temps
suspendu dans elephant trees. Fort
heureusement, le temps se déroule dans l’essentiel de la communication musicale
sans qu’il se fasse sentir : une heure à toute vitesse pour des musiciens
qui prennent le temps de jouer avec un sentiment d’urgence, cela mérite d’être
souligné. Pour le final, Trzaska a gardé la saveur particulière du son de sa
clarinette et Brice un festival de doigtés ponctué à merveille par le cliquetis
piaffant des cymbales de Sanders : le trio nous emporte dans un swing
irrésistible. Il aboutit au seul solo de batterie (assez court) qui relance
dans un groove peu usité, lequel permet au batteur de démultiplier les frappes
sans surjouer alors que le clarinettiste jongle avec deux notes dans un appel
modal suggérant des mélodies balkaniques. L’art de terminer un disque. Une
belle performance !
Veracity Trevor Watts FMR cd377
Hear and Now Trevor Watts
- Veryan Weston avec Mark Sanders
John Edwards DVD FMR DVD05 réalisé par Mark French.
Trevor Watts est le
saxophoniste alto, alto, par excellence, un maître incontournable, la pureté du
son et l’intensité naturelle alliée à une émission … parfaite ! Et aussi,
un grand maître des rythmes, qui se révèle dans ce domaine plus sûr que ceux
qui sont sensés personnifier cet aspect fondamental dans la musique :
batteurs et percussionnistes. Durant des décennies, sa musique a trouvé un aboutissement
dans ces groupes Amalgam et Moiré où le rythme démultiplié était le centre
d’intérêt. Avec l’âge venant (passé la septantaine), ce routier toujours alerte
revient à ses premières amours : le libre jazz libre, la free music où le musicien à la fois sollicite tous
ses moyens, ses expériences et son imagination pour inventer une musique
entière et complète dans l’instant. Lorsque son premier album solo fut publié (World Sonic / Hi4Head cd 004), Trevor Watts m’avait confié l’avoir enregistré à la demande
insistante du producteur. Il estime que
la musique soit surtout être partagée avec un partenaire et il a d’ailleurs
trouvé en Veryan Weston (qui fut son alter ego dans Moiré), le partenaire
idéal. Aujourd’hui, voici un deuxième album solo, Veracity et c’est
formidable ! Un chapelet d’idées mélodiques, de constructions rythmiques
et modales, de danses secrètes, un syncrétisme d’une cohésion et d’un
pluralisme inouïs servis par la sonorité la plus classe qu’il soit donné d’entendre.
Egale à un Art Pepper, un Johny Hodges. Dans la fratrie des saxophonistes alto
qui ont libéré le jazz les prénoms d’Ornette, Eric et Jackie ont écrit
l’histoire avec des lettres de feu, accompagnés par des géants : Anthony
Braxton, Jimmy Lyons, Sonny Simmons, Mike Osborne, Roscoe Mitchell, Oliver
Lake, Elton Dean… et puis Marco Eneidi, Rob Brown, Gianni Gebbia… Ouf !!
La concurrence est rude ! On a l’embarras du choix ! Avec ses
tournées extra européennes dans les festivals musique du monde (son Drum
Orchestra réunissait des percussionnistes africains), Trevor Watts, LE sax alto pionnier du free européen depuis le
milieu des années soixante, s’est fait un peu oublier de l’univers
« musiques improvisées ». Veracity mettra les pendules à
l’heure. Trevor Watts a par dessus tout une sonorité qu’on peut présenter comme
un modèle pour sa beauté et pour sa singularité. Il a d’ailleurs toujours voulu
être un musicien paradoxal. Son matériau musical est à la fois simple et
complexe, basé sur une combinaison intelligente de motifs mélodiques et de
séquences rythmiques articulés et distribués avec une perfection formelle qui
séduira aisément les amateurs de jazz de plusieurs écoles pour autant qu’ils
veuillent sortir un tout petit peu de leurs habitudes. Avec seulement deux ou
trois notes jouées et tirées de leur contexte, Trevor Watts n’a aucun mal à
faire naître dans l’imagination subconsciente de l’auditeur toutes les
combinaisons mélodiques. Le lyrisme à l’état pur et, c’est cela qui le rend
intéressant, à mille lieux de la doxa jazziste (stakhanoviste) qui découle des
standards de Broadway, genre pour duquel il a fait une place tout à fait nette
dans son œuvre : dehors ! Rien ici ne fait allusion au parkerisme ou
même au dolphysme. Trevor Watts, c’est un saxophoniste alto 100 % musical avec une technique
optimale et où le rôle créatif de cette dernière passe au second rang avant
l’émotion. On pense à Art Pepper. D’un point de vue purement technique, il faut
quand – même souligner aa remarquable projection sonore. Dans une grande salle
et sans micro, il ne faut pas tendre l’oreille pour l’entendre, alors qu’il
semble ne pas souffler plus fort que dans un studio d’enregistrement. Chez
Watts, la technique n’est seulement que le vecteur de l’émotion indicible et de
l’invention pure. Dans l’exercice solitaire de Veracity, il donne la
quintessence de son inspiration et, ce faisant, il raconte de belles histoires.
Une fois au feu de l’improvisation avec des camarades de choix, Trevor Watts nous révèle combien son
engagement est sincère, lucide, intense et poétique. Et à cet égard, Hear and Now est un beau
témoignage. Le DVD alterne interviews subtiles et sincères et extraits d’un
concert, son propos est intelligent et on sent toute la modestie du personnage.
Les séquences musicales en duo avec le pianiste Veryan Weston volent haut par leur surprenante interactivité loin
des clichés et le quartet qui enchaîne est un modèle du genre. John Edwards et Mark Sanders ayant déjà tracé avec Weston une belle histoire de
connivences (cfr Mercury et Gateway /Emanem), à quatre, ils
renouvellent cette formule instrumentale par la singulière vivacité des
échanges et leur capacité à secouer les poncifs et les idées toutes faites avec
une étonnante cohésion. Une aventure dans le droit fil des fabuleux duos Watts
– Weston publiés par Emanem : Six Dialogues Emanem 4069 et Five
More Dialogues Emanem 5017 et Hi4Head : Dialogues in Two Places. Dialogues ? Dans l’histoire
discographique du jazz libre, Watts &Weston
personnifient au plus haut point la quintessence du dialogue entre un saxophone et un piano,
Weston étant un pianiste superlatif, unique pour savoir créer les conditions du
dialogue optimal basé sur l’improvisation permanente. Je n’en connais pas
d’autres. Le secret des deux partenaires, une absence totale d’égo «musical »
et une entière disponibilité dans l’instant, oublieux de leurs marottes
individuelles (absence de plan séquences prédigérés *), tout en étant fidèle à
leur personnalité propre. Ils affectent de s’ignorer ou de se répondre,
d’anticiper ou de prolonger le développement l’un de l’autre en utilisant tous les
paramètres et les ressources de leur immense savoir-faire sans aucune arrière-pensée.
La musique totale de l’instant, l’invention.
Si vous suivez certains
improvisateurs à la trace, vous vous rendez compte que quoi qu’il arrive,
quelque soient leurs partenaires, ils resservent les mêmes petites choses
qu’ils vont puiser dans leur petit sac à malices et les resservent plic-ploc
comme pour meubler le temps qui passe.
La scène de la musique
improvisée est redevable à la chanteuse Pat
Moonchy et à son compagnon, le guitariste Lucio Liguori, d’avoir animé pendant une vingtaine d’années le club
Moonshine,
un bar du centre de Milan, dédié aux musiques improvisées et expérimentales.
Quant au batteur Pasquale « Lino » Liguori (orthographié
aussi Pascale), c’est un musicien de la génération swing – bebop qui n’a pas
hésité à suivre son fils Gaetano Liguori,
pianiste pionnier du new jazz de la
péninsule des années 70’, lorsque la scène ronronnante du jazz transalpin s’est
trouvée secouée par la déferlante « free » et improvisation fin des
années soixante. En 1975, Lino a participé comme batteur au fabuleux et
historique Concerto della Statale de Mario Schiano publié par le label Red
Records quand celui-ci était vraiment rouge. Les Liguori et Pat Moonchy forment
une famille musicale avec le bassiste Roberto Del Piano qui lui, a œuvré durant
des années, dans les groupes de Gaetano Liguori (Terzo Mondo Palcoscenico
Records 1980) et des musiciens comme Filippo Monico, Guido Mazzon, Massimo
Falascone, le fameux photographe Roberto Masotti et l’ingénieur du son Paolo Falascone etc… Cette connivence amicale fait que le Moonshine avec son magnifique décor « home made » a été
un des lieux les plus chaleureux pour que cette expression musicale puisse s’épanouir.
(Il va devoir malheureusement fermer sous peu). Alors cette boîte
à chaussures est un duo touchant et très réussi. Pat Moonchy n’est sans
doute pas une chanteuse de l’envergure des Maggie Nicols, Julie Tippets, Jeanne
Lee ou Ute Wassermann et Shelley Hirsch. En comparaison, elle a un registre
limité et un manque de « puissance », mais cela ne l’empêche pas de
faire une performance vraiment épatante en assumant et en sublimant ses limites
avec intelligence et sensibilité. En effet, elle a créé son propre style en
fonction de ses capacités avec une réelle maîtrise et de la suite dans les
idées. Sa présence scénique semble sophistiquée (habillement, port de tête,
expression du visage et du corps, maquillage) et sa voix fluette évoque celle
d’une enfant de bandes dessinées ou d’une série TV surréaliste. Un contraste
déroutant. Le jeu de la batterie est tout en nuances, le sensible Lino frottant
et faisant tinter les cymbales et résonner les peaux avec une remarquable
variété de frappes et un beau sens de la dynamique sonore qui est le complément
parfait pour une voix féminine. Sept morceaux autour des deux à cinq minutes et
un seul qui s’écoule sur une douzaine de minutes. Un bel échange- communion
ludique. Etant moi-même vocaliste improvisateur, je peux vous dire que Pat Moonchy a dû travailler d’arrache-pied
et apprendre la concentration maximum , la force mentale, pour parvenir à
naviguer dans une performance de quarante minutes comme celle qu’on entend ici.
On y trouve une forme d’humour, une distanciation, un goût sûr sans faux pas,
une réelle capacité théâtrale et un sens inné de la retenue dans une forme
d’expressionnisme. Elle affectionne un aigu fantomatique, une diction
gazouillante ou une voix de gorge famélique qui créent un personnage facétieux,
une fée Clochette décalée et vraiment touchante. Lino Liguori nous fait entendre sa compréhension profonde et vécue
des possibilités expressives de la batterie dans une liberté rythmique
authentique. La classe ! Ces deux musiciens n’ont aucune prétention
« professionnelle » (carrière), mais vivifient tout ceux qu’ils
touchent par leur rayonnement amical et leur amour de la musique libre sans
compromis. Maintenant que le Moonshine
va fermer après autant d’années, je garde précieusement cette Scatola
di Scarpe comme un talisman pour préserver le souvenir de ce lieu de
rêve éveillé.