3 janvier 2019

Thanos Chrysakis Sue Lynch James O’Sullivan Joe Wright/ Ian Brighton Phil Wachsmann Marcio Mattos Radu Malfatti/ Biliana Voutchkova Alexander Frangenheim Antonis Anissegos/ Marylin Crispell Tanya Kalmanovitch Richard Teitelbaum/ Paul Dunmall Alan Niblock Mark Sanders/


Iridescent Strand Thanos Chrysakis Sue Lynch James O’Sullivan Joe Wright Aural Terrains 

Iridescent Strand, une œuvre sonore constituée de cinq parties numérotées I, II, III, IV et V. Un ensemble instrumental atypique : Thanos Chrysakis, le responsable du label, laptop computer et synthétiseurs, Sue Lynch, sax ténor, flûte et clarinette, James Sullivan, guitare électrique et Joe Wright, sax ténor + « dynamic feedback system ». Une telle instrumentation indique au premier abord que les artistes travaillent au cœur de la musique alternative expérimentale et/ou improvisée. Leur méthode dans l’improvisation, leurs modes de jeux, l’étagement des sons et leur imbrication dans l’instant créatif les rapprochent plus du courant AMM que de l’interactivité qui découle de l’expérience du Spontaneous Music Ensemble, John Russell, Phil Wachsmann etc…  Comme toujours pour ses propres productions pour Aural Terrains, le compositeur - improvisateur Thanos Chrysakis a opté pour une œuvre graphique géométrique sur le recto de la pochette. Avec une couleur dominante verte foncée – noire, elle est faite de courbes disposées autour d’alignements verticaux, de surfaces arrondies d’un côté hachurées et traversées de lignes  droites horizontales ou obliques parallèles évoquant (peut être) une partition graphique. L’imbrication des sons électroniques abrasifs et étirés, des froissements des colonnes d’air des saxophones, du traitement du feedback, des effets saturés de la guitare, des drones décalés, leur étalement dans le temps trouvent quelque correspondances temporelles avec l’ordonnancement de ces motifs géométriques et leur perspectives. Ceux-ci sont  l’œuvre du graphiste Carlos Santos, lui-même responsable du graphisme du label Creative Sources. On découvre des liens esthétiques évidents entre ce label portugais et la musique d’Iridescent. Une écoute attentive de leur continuum sonore, dont chaque partie plonge dans le silence par la vertu du fading ou d’une coupure nette (dans la partie V) à la fin de chacune d’elles, révèle la profonde cohérence et l’intensité croissante et obsessionnelle de la musique. Un déroulement dans l’infini qui ne trouve de solution que dans l’instant et par l’activité sonore collective et une écoute astucieuse.  Un excellent album.

Marsh Gas Ian Brighton Bead 3 réédition FMR CD0521-1018
Enregistré à une époque où les documents / enregistrements illustrant l’alors jeune « european free improvised music » étaient rarissimes par rapport à ceux des décennies 2000-2010, Marsh Gas est un album majeur que j’ai écouté des dizaines de fois dès 1977, année de sa parution. Ian Brighton, maître d’œuvre de sa conception et guitariste audacieux, avait convié le contrebassiste Marcio Mattos, le tromboniste Radu Malfatti, le guitariste Roger Smith et le violoniste Phil Wachsmann au légendaire West Square electronic Studio de Barry Anderson à Lambeth. Ce lieu fut l’épicentre de l’école « Phil Wachsmann » de l’improvisation Londonienne avec des ateliers, des cours de musique électronique en liaison avec l’improvisation, des concerts et le travail intensif avec des danseuses. Phil Wachsmann fédérait les énergies de ces jeunes improvisateurs issus du Little Theatre Club qui évoluaient en parallèle à Bailey, Parker, Guy, Rutherford, Lytton documentés par Incus (la première génération). Les improvisateurs de la deuxième génération s’étaient réunis autour du label Bead.  La troisième parution de Bead, Marsh Gas, contient des duos guitare électrique – contrebasse Brighton / Mattos dans Bullrushing, guitare électrique – trombone Brighton / Malfatti dans Brotherhood Alone et trio guitare électrique, violon et guitare acoustique Brighton/ Smith/ Wachsmann dans The Wizard Dream , lequelclôturait la face A. Le premier morceau de la face B, Silver River Shuffle, rassemble Brighton, Malfatti, Mattos et Wachsmann et se révèle être un rare document (pour l’époque) d’un quartet librement improvisé « British ». Brighton, Mattos et Wachsmann collaboraient alors dans le groupe Strings avec le percussionniste Trevor Taylor qui vient juste de publier un nouvel album sur FMR  (Strings).Avec Malfatti , le percussionniste Frank Perry et le violoncelliste Colin Wood, le guitariste et le violoniste avaient enregistré le fantastique Balance (Incus 11), un des meilleurs témoignages de cette musique improvisée british naissante. Marsh Gas débutait par un très beau solo de guitare, Plickie, extrait d’un concert dans la cathédrale de Chelmsford dont une suite orchestrale  intrigante avec Brighton à la guitare, le saxophoniste alto Jim Livesey, dont c’est le seul enregistrement improvisé connu, et the Sound in Brass handbells – dirigé par Andrew Hudson. Le deuxième morceau de la face B,  raconte  une histoire avec des personnages imaginaires représentés par des sons ou personnalités sonores, Ian Brighton et sa guitare étant Plickie comme on peut l’entendre au début de l’album où il se présente au public. Ce projet musical s’est développé en intégrant la participation active d’enfants autour d’une histoire dont certains éléments sont dessinés dans la pochette du CD. Le gnome Plickie est en fait le petit frère le plus proche de Derek Bailey et le jeu de Ian Brighton est vraiment la révélation de ce disque. Son imagination et ses capacités à trouver des sonorités inouïes sont égales à celles de Bailey, même si leur degré de virtuosité n’est pas comparable. On trouve évidemment un territoire commun entre les deux guitaristes, mais surtout, Ian Brighton se distingue lorsqu’on écoute soigneusement. Par exemple le duo Malfatti - Brighton  est une pièce d’anthologie incontournable, aussi voisine qu’éloignée de la paire Bailey - Rutherford inclus dans Iskra 1903 (Incus ¾ 1973 rééd Emanem) et dégageant une énergie tout à fait différente. The Wizard Dream, est un des premiers enregistrements d’improvisation d’instruments à cordes violon – guitares dont la trame sonore est à l’époque la musique la plus éloignée de l’identification au free-jazz tout comme les dix minutes de Silver River Shuffle. Les deux plages restantes, The Chapel of Splintered Glass et Marsh Gas avaient été enregistrées dans la cathédrale de Chelmsford parce que le grand père de Ian, un expert spécialiste des cloches y avait été le sonneur plus de 70 ans auparavant. Le duo sax guitare de Brighton – Livesey agrémenté des sonorités cristallines de cloches  manuelles délivre un magnifique dialogue (Chapel of Splintered Glass). Un bon conseil : si vous aimez déjà (beaucoup) Derek Bailey, détournez vous de ses dernières productions (Carpal Tunnel, All Thumbs, String Theory etc…) et précipitez-vous sur Marsh Gas. Je rappelle que Brighton a aussi travaillé et enregistré avec Tony Oxley, Barry Guy et Wachsmann (February Papers Incus 18).  Avec une approche similaire au départ, mais une sensibilité très différente, Ian Brighton réalise une musique originale et tout aussi passionnante que celle du maître de Sheffield. La dernière pièce en solo intitulée Marsh Gas nous mène dans un univers de résonances (l’église), de timbres inouïs, de glissandi uniques avec une amplification légère et soigneusement spécifique combinée à la réverbération de l’église.  À l’époque, 1975, Ian Brighton est un des guitaristes improvisateurs les plus exemplaires et après avoir disparu des radars revient sous les feux de la rampe grâce aux efforts de FMR ( trois CD’s tous récents : Kontakte Trio, Imaginings et Strings). Indispensable !

Strings Phil Wachsmann Trevor Taylor Marcio Mattos Ian Brighton FMR CD496-0618

Ce quartet historique avait été initié il y a plus de quarante ans et si trois des musiciens, Brighton (guitare), Wachsmann (violon) et Mattos (violoncelle et contrebasse)  figuraient dans l’album Marsh Gas (1975 Bead 3, une pièce incontournable de l’improvisation libre réédité cette année par FMR). Ce nouvel album intitulé Strings est le tout premier enregistrement de cette formation en quartet. En quartet, dis-je, car en 1988, faute d’avoir jamais publié leur premier album, ils avaient fixé dans le digital alors naissant, le très méconnu Eleven Years from Yesterday en quintet avec le percussionniste Trevor Taylor le pianiste Peter Jacobsen. Ce fut le premier album produit par FMR, le label de Trevor Taylor alors intitulé Future Music Records en collaboration avec Bead, le label collectif que Wachsmann a repris plus tard à son compte. On trouva aussi Wachsmann et Brighton dans le groupe Balance (Incus 11 avec Radu Malfatti, Frank Perry et Colin Wood, autre incunable merveilleux) et le groupe de Tony Oxley (February Papers Incus 18, album précurseur de la nouvelle improvisation, tendance qui se profilera vers l’an 2000.  L’intérêt de la musique de Strings vers 1977 résidait dans le développement d’un type d’improvisation chambriste contemporaine qu’on qualifie aussi de « non idiomatique » caractérisée par le remise en question radicale des paramètres de jeu et des techniques instrumentales combinées avec l’amplification électrique et des éléments/ effets électroniques auxiliaires.  Mais rassurez-vous, ce nouveau CD n’est pas un revival, même si on reconnaît clairement Mattos et Wachsmann par endroit avec leurs col legno caractéristiques, le jeu pointilliste, une hyper interactivité, l’atonalité et l’ouverture totale aux bruits musicaux etc… . En effet, Trevor Taylor n’avait quasiment jamais enregistré dans les années 70 si ce n’est un solo inclus dans l’anthologie improvising percussionnist (avec Lytton, Prévost, Stevens et Perry et parue en 2005 chez FMR). Et donc, nous n’avons aucune idée comment aurait pu sonner Strings en 1977 faute d’enregistrements de TrevorTaylor à l’époque. Les sonorités et la dynamique actuelle du groupe Strings sont conditionnées par l’usage exclusif du vibraphone et de percussions électroniques de Taylor. Il n’y a pas de batterie (peaux et cymbales), mais quelques petites cloches dont les sonorités cristallines s’envolent par dessus des entrelacs et arabesques chaotiques des trois cordistes. Le violon et le violoncelle font corps l’un à l’autre se complétant merveilleusement tout en jouant avec des cadences et des intensités différentes, constamment variées et mouvante, sans oublier l’altération des sons grâce à leur dispositif électronique hyper sophistiqué dans son utilisation. On notera les pizzicati hésitants de Wachsmann et ses moulinets vifs et délicats à l’archet en sottovoce. Ian Brighton crée des trames sonores où le jeu de la pédale de volume, le timbre clair et la conception de l’amplification  s’insère à merveille dans le son du groupe. Taylor inscrit ses interventions par petites touches qui répondent à une action précise de ses camarades au milieu d’une interaction très fouillée où le silence de chacun alterne en permanence avec leurs interventions excellemment ciblées et toujours renouvelées. Un sens du timing impressionnant. Si ce type de musique à laquelle on associe Derek Bailey, John Russell ou Paul Rutherford est relativement récurrent sur la scène (insect music, improvisation British), la démarche de Strings se singularise grâce au vibraphone de Trevor Taylor qui apporte un aspect mélodique, une interactivité supplémentaire, plus de relief et de perspectives dans cette multiplication complexe de signes et signaux  abstraits qui s’entrecroisent et s’enchaînent dans un sens très aigu et surprenant de la discontinuité . L’utilisation individuelle de l’électronique en relation au jeu instrumental induit une dimension fascinante enrichissant véritablement l’improvisation collective. Retards, brèves répétitions, glissandi, aura sonore, percussivité, transformations sonores, métamorphoses, etc… Le développement de leurs improvisations suit un cheminement insondable, la logique étant ici largement éclipsée par une intuition ludique joyeusement excentrique tout en paraissant naturelle et allant de soi. Un excellent chef d’œuvre qu’on peut réécouter à plusieurs reprises durant deux ou trois jours sans se lasser.

Frost burning The Forestry Commission Biliana Voutchkova Alexander Frangenheim Antonis Anissegos FMR CD470-0318

Biliana Voutchkova violon, Alexander Frangenheim contrebasse et Antonis Anissegos piano. Trois improvisateurs dans un remarquable échange à la fois chambriste classieux avec un bel usage du silence, et une diversité de modes de jeux, et une belle énergie percutante cadrée par un sens proactif de l’écoute et d’interventions ciblées avec un bel à propos. Sept improvisations dénommées archive 5 :52 ou 7 :07 selon la durée de chaque morceau. Tout l’intérêt de leur collaboration est basée sur la multiplicité des cadences et action individuelles qui prennent le temps de respirer et de suspendre leur geste afin de créer des équilibres sans cesse inversés ou renversés. Le travail à l’archet se concentre sur le sonore et l’intensité des vibrations à la limite du grattage bruitiste et conjugant les accents à la tangente des secousses pointillistes de leurs partenaires. Ailleurs le jeu parsemé dans les cordes bloquées du piano donne l’occasion à la violiniste d’exciter les cordes de son instrument dans des glissandi surréels. Le morceau suivant est complètement zen avec Anissegos qui égrène chocs brefs et notes solitaires sur un léger fond de drone à la contrebasse. C’est sans nul doute un des tout meilleurs albums d’Alexander Frangenheim et il nous permet de découvrir le travail exquis et passionné de Biliana Voutchkova et la démarche intelligente d’Antonis Anissegos.  Hautement recommandable !

Dream Libretto Marylin Crispell Tanya Kalmanovitch Richard Teitelbaum. Leo CD LR 849
Pour qui connaît Marylin Crispell par le truchement de ses albums solos, de sa collaboration cruciale avec Anthony Braxton entre 1984 et 1994 dans le groupe qui comprenait Mark Dresser et Gerry Hemingway, son duo avec ce dernier etc… ce Dream libretto sera une surprise de taille. Cet album inspiré par la poésie de Robert Gibbons est constitué de deux parties : en trio avec les électroniques de Richard Teitelbaum et la violoniste Tanya Kalmanovitch  Memoria / For Pessa Malka en cinq courts volets et puis les miniatures en duo avec la même violoniste, the River. Une évidence s’impose : pour ce livret de rêve, le jeu de piano, la dynamique et la conception de la musique est à la fois basée sur le toucher de la pianiste mis en valeur par une démarche minimaliste retenue faisant la part belle au silence, à la méditation, à l’espace, mais aussi l’élégance et la grâce. Cela évoque Morton Feldman et les formes contractées et dodécaphoniques de Schönberg. Teitelbaum offre des paysages sonores dans les quels les lents arpèges distanciés étalent le merveilleux toucher de Marylin Crispell, la violoniste apportant sa touche personnelle de plus en plus présente au fil des pièces du trio. Ainsi lancées, les deux musiciennes partagent cinq instantanés en suspension où la moindre note, le moindre vibration équilibre l’édifice fragile et éphémère. Tanya Kalmanovitch a une sonorité chaleureuse et puissante, pas trop académique : on entend clairement des zestes de micro tonalité dans les traits sûrs de son archet et la pression de ses doigts sur la touche.  Une belle œuvre plutôt contemporaine rafraîchissante et réussie !

Dark Energy Paul Dunmall Alan Niblock Mark Sanders FMR CD506-0918

Paul Dunmall, Paul Dunmall, PAUL DUNMALL ! Saxophone ténor exclusivement avec le contrebassiste Alan Niblock, un nouveau venu et le batteur Mark Sanders qu’on entend fréquemment en la compagnie du saxophoniste du Gloucestershire. Commençant dans un registre relativement doux et réservé avec son extraordinaire technique, Dunmall conduit l’improvisation collective minute après minute sans se soucier d’accélérer la cadence, préoccupé par ma recherche du son idéal dans l’instant en laissant toute l’indépendance voulue à ses deux camarades qui contribuent avec finesse et intensité à mi-chemin entre une tradition sublimée et la recherche de sons et leur étirement. Niblock est excellent à l’archet et Sanders construit un univers percussif en rythmes libres / pulsations mouvantes  avec un jeu très fin et cristallin complètement en phase avec Dunmall. Cinq pièces : Entry, Dark Energy, Light Matters, Dark Matters et Life Masters qui prolongent, complètent et étirent les éléments de l’improvisation initiale. Le souffle et les facettes du jeu complexe de Dunmall font  à la fois la synthèse et se nourrissent d’une succession de géants du sax ténor : en premier lieu Coltrane, mais aussi Shorter, Rollins, Griffin, Rivers, Henderson, Ayler… Au-delà de la technique hors du commun (triples détachés, dynamique, inventivité mélodique hors norme, science harmonique dantesque), c’est surtout l’inspiration et sa capacité à aller chercher des sons qui répondent instantanément aux signaux émis et audaces manifestées par ses collègues et qu’il intègre dans le fil de sa pensée musicale. La finesse infinie et empathique du jeu de Mark Sanders particulièrement aux cymbales convient parfaitement aux méandres lunaires du saxophoniste et construit un espace idéal au plucking adroit du contrebassiste. Un trilogue tout en délicatesse s’établit et se poursuit d’une pièce à l’autre pour s’’enfler au fur et à mesure que l’on s’avance dans les échanges, Dunmall explorant le registre aigu ou le grave dès que les frappes se mettent à déferler sur les peaux. L’interaction s’anime de plus en plus alors que Dunmall contient le débit pour faire son sort à l’anche et trouver la sonorité juste. Il démontre clairement qu’il est un souffleur instinctif, jouant à l’émotion, sa technique ne lui servant qu’à agrandir sa palette. Son refus d’exploser en gerbes de sons articulés à la vitesse V3 avant le quatrième morceau force ses collègues d’aller chercher de nouvelles idées. Niblock ouvre Light Matters par un solo de contrebasse dans les graves patauds pour s’égayer dans un cycle de pizzicati tournoyant et Dunmall poursuit sa quête d’éléments épars qu’il rassemble en musardant hors des sentiers battus. Ce n’est qu’arrivé à Dark Matters que l’articulation ahurissante de son souffle déchiquète l’air pesant de cette fin de journée alors que le soleil se baisse en éclaboussant la campagne. Mais Dunmall fait fi de la logique et suit son penchant du jour laissant ses collègues fleurir leurs improvisations de détails infinis. Ah le jeu de cymbale de Mark Sanders. Un magnifique album librement improvisé qui déroge aux lois du jazz free pour s’envoler au pays des rêves. À chacun de ses innombrables albums Dunmall et consorts font oublier les précédents par la profonde sincérité de sa démarche liée à l’instant présent et vécu.

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